Parade sonore

J'ai crié.      j'écris "j'ai crié"      j'écris "j'écris j'ai crié"
                       j'écris "j'écris j'écris j'ai crié"

Allongé sous un banc. J'observe.
J'observe les dessous des filles.
Ces filles qui viennent s'asseoir en retroussant leur jupe.
Je ferme les yeux. Mon ouïe s'amplifie peu à peu.
J'assiste alors à un parade sonore.

les frissements de la culotte sur le banc
les pages du journal prenants le vent
le chant des souliers foullants l'allée de gravier
les doigts dansants sur le clavier d'un ordinateur portable
le sifflement du vent dans les branchages
l'insupportable hurlement des sirènes de flic, pompiers et ambluances
les doux cris de la cour d'école primaire
l'odieux grondement des moteurs dans la rue
la divine mélodie des oiseaux valsants au dessus du parc
les gloussements lointains d'un groupe de minettes bébettes
le gazon qui pousse sous un soleil dégoulinant sur mes jambes
les larmes d'un coeur brisé coulant le long de ses joues
le balais du balayeur frottant les trottoirs
les renifflements d'un clébard sur ses crottes
le souffle régulier de la secrétaire faisant son jogging après le bureau
les feuilles de l'arbre tombant avec souplesse sur la pelouse fraichement coupée
l'horrible klaxon des chauffards qui crissent des pneus
les faibles miaulements d'un chaton égaré
le sifflet de l'agent de police interpellant les chauffards
la violente mastication d'une machoire machant bruyamment un sandwich

J'ouvre un oeil.
Ma stuppeur ouvre le second.

Les tendres fesses précédentes ont laissé place à un gigantesque popotin, prenant l'allure d'un étonnant pouf géant, dans lequel on risquerait de sombrer sans jamais en ressortir sauf.
C'est là qu'il est sorti.

                                                                                     le cri